Avec un mois sans alcool les consommateurs réguliers d’alcool essaient “de combattre une habitude” afin de “retrouver un plaisir maîtrisé”.
“Une partie de nos consommations” d’alcool “sont liées à des contextes” sociaux, a expliqué Jean-Michel Delile, président de la Fédération Addiction, alors que le Dry January, le mois sans alcool, battait son plein en janvier. Cela permet de se rendre compte que ces consommations sont souvent liées à “un effet de conformité de groupe”.
Qui serait tenté par un mois sans alcool ?
Jean-Michel Delile : Nous pouvons inviter toutes les personnes qui sont des consommatrices occasionnelles ou régulières d’alcool à faire cette expérience pour voir ce que cela peut donner de se donner un défi d’une pause pendant un mois. On est souvent tenté de se livrer à quelques excès. Cela sera sans doute plus bénéfique pour des personnes qui sont des consommatrices régulières car l’impact peut être plus sensible par rapport au poids, la qualité de sommeil, mais aussi sur le plan financier, puisque l’alcool coûte pas mal d’argent.
Est-ce que cela permet de prendre conscience de la place que prend l’alcool dans nos vies sociales ?
C’est un enjeu central. On se rend compte qu’une partie de nos consommations sont liées à des contextes. Elles sont devenues automatiques. Elles ne correspondent pas vraiment à une attente, à une recherche, un désir, mais plutôt à un effet de conformité de groupe. L’intérêt d’un mois sec comme un dry january par exemple, c’est d’inverser cette dynamique en faisant une pression collective de défis entre amis. On se rend compte que l’on peut inverser un peu cette dynamique. D’autre part, cela permet aussi à des personnes, notamment des jeunes en contexte de soirée où ils n’ont pas vraiment envie de boire mais risquent d’être un peu mal vus ou d’être un peu à côté s’ils ne boivent pas, de dire : attention, moi, je fais une pause. C’est quelque chose qui s’inscrit dans une dynamique positive, ludique et non pas dans une espèce de fermeture tristounette.
Comment faire pour tenir un mois entier ? Est-ce que ce n’est pas trop long ?
Faire ça tous ensemble, en couple, entre amis, en famille, avec des copains, des sorties, se lancer des défis, des challenges. Ce qui peut être fait aussi, ce n’est pas nécessairement de se donner un objectif radical si l’on pense ne pas être en mesure de l’atteindre, mais se donner des objectifs intermédiaires, ne pas boire dans la semaine ou limiter les consommations lors d’une soirée. Et ensuite, ce qui est intéressant, c’est que cela va permettre de vérifier si c’est facile ou pas. Et certaines personnes vont se rendre compte que, peut-être à leur insu, elles avaient commencé à s’accrocher ou à prendre une habitude qu’il est temps de combattre pour essayer de retrouver un plaisir maîtrisé, un vrai plaisir et non pas quelque chose qui soit de l’ordre d’une contrainte.
Si on craque, est-ce que cela veut dire que l’on a un problème avec l’alcool ?
Pas nécessairement. Mais en tout cas, il faut pouvoir vérifier dans quel type de circonstances on a craqué. Cela peut être le stress au boulot, en télétravail, un contexte entre amis où on se dit qu’on va être vu d’une drôle de manière si on ne s’associe pas à la fête en buvant avec les autres. C’est-à-dire essayer d’identifier les facteurs externes à soi qui vont vous pousser à avoir ce type de comportement, ce qui peut ensuite permettre de mieux les maîtriser.
Est-ce qu’il y a d’autres façons de se faire aider si on souhaite se détacher un peu de l’alcool ?
Dans ce type de contexte, ils peuvent vraiment prendre conscience du fait qu’il y a un problème. Et là, évidemment, ce n’est pas un mois sans alcool qui va être une réponse et un signal d’alerte. Il faut évidemment se rapprocher de son médecin. Il faut se rapprocher des centres de soins en addictologie, de telle façon que les personnes puissent avoir un accompagnement qui les aidera dans leur cheminement pour retrouver une vraie liberté par rapport à l’alcool.